Beauregard

Hormis cette année où quelqu’un a eu l’idée ingénieuse de nous coller une élection législative juste avant les vacances, pendant une coupe d’Europe de football et avant les JO, l’été est normalement la période du farniente et des festivals.

L’année dernière par exemple, j’étais à Rio Loco à Toulouse avec mon ami d’enfance Jacko (lire Rio Loco), cette année j’ai envoyé mes deux ados d’enfants au Festival Beauregard à Hérouville. Je précise que le lieu n’a rien à voir avec le château d’Hérouville, ce studio d’enregistrement mythique créé dans les années 70 par Michel Magne et situé dans le Val d’Oise. Cette Hérouville-là est située dans le Calvados à proximité de Caen et c’est là où j’ai grandi. Plus drôle encore, nous allions pratiquement toutes les semaines avec l’école au château de Beauregard justement car il disposait d’un grand parc et d’une base nautique où nous pouvions pratiquer le kayak, l’aviron et tout ce qui va sur l’eau et qui glisse.

En 2009, une bande de joyeux rêveurs a eu l’idée d’y créer un festival de musique qui est devenu en quelques années seulement un incontournable de la scène musicale estivale attirant des spectateurs de la France entière et des artistes du monde entier. Cette année par exemple, il y avait des très connus tels que David Guetta ou Massive Attack et des moins connus dont je ne vous donnerai pas le nom car vous ne les connaissez pas et moi non plus. Retenez juste que le festival est vraiment devenu un évènement musical énorme en partant de trois fois rien, juste un petit château pas bien impressionnant et un grand parc à côté d’une base nautique où nous pagayions quand nous étions gamins.

Normalement, je ne suis pas très fan des festivals. Je préfère les petites salles car le son est meilleur et l’artiste plus proche. J’ai aussi un côté flemmard et pépère car je préfère être assis que planté là debout pendant des heures. Beauregard est un peu différent cependant, les concerts sont de courte durée, une heure en général, et il faut se déplacer d’une scène à l’autre à chaque concert, jamais deux concerts en même temps évidemment sinon ce serait la cacophonie, le parc est certes grand, mais pas immense non plus. Et puis, il y a des dizaines de stands pour manger, boire, se divertir, découvrir, acheter des trucs divers et variés comme la variété et comme les produits dérivés des artistes, donc toute une vie qui grouille un peu partout, pas le temps de s’ennuyer en effet. C’est pourquoi mes mômes y sont depuis quatre jours, dormant un jour sur deux chez des copains, et ils adorent. Ils font également leur apprentissage d’une forme de liberté totale, inutile en effet de les accompagner pour les surveiller, dans un festival avec des dizaines de milliers de gens dans le public, autant dire que vous les perdriez en quelques minutes. Au lieu de cela, il faut leur faire confiance et voir comment ils se débrouillent tout seuls. Ce qui n’empêche pas de rester sur le qui-vive, là par exemple il est presque une heure du matin et j’attends qu’ils m’appellent pour me dire de venir les chercher et je tue le temps en écrivant ce billet.

Dire qu’on ne stresse pas quand on est parent d’envoyer ses enfants dans un festival de musique serait mentir, mais il faut savoir lâcher prise plutôt que de s’accrocher aux rideaux en permanence. Parent est un véritable métier qui s’apprend tout au long de la vie. Je vais donc attendre que mon téléphone sonne et terminer ce texte, en espérant que cela ne m’emmènera pas au bout de la nuit, eux ont encore de la résistance, moi beaucoup moins.

Parfois cependant, je dois tester cette résistance à l’épreuve du réel et sans m’y être préparé au préalable. Je vous ai déjà raconté je crois mon aventure lyonnaise il y a quelques semaines où je suis allé pour être juré aux oraux d’admission en école de commerce mais bon ce n’est pas grave, ça fera deux. J’avais réservé des hôtels pour chaque jour sauf pour le dimanche soir, je me disais bêtement que j’en trouverai un au dernier moment en fonction de l’endroit où je serai en fin d’après-midi, mon avion ne décollant que le lendemain très tôt. C’était sans compter sur le concert de Taylor Swift, cette chanteuse américaine dont le nom me disait vaguement quelque chose mais sans plus. Aujourd’hui, je peux attester que cette jeune femme est une superstar planétaire car à cause d’elle j’ai dormi dans ma voit… j’interromps cette phrase car ma fille vient de m’appeler avec le téléphone d’un ou une copine pour me dire qu’elle a mis son téléphone dans la sacoche d’une ou un autre copain mais que bien sûr elle l’a perdu.e de vue, donc plus de téléphone, donc super pour communiquer avec ses parents pour qu’ils viennent te chercher, voilà la vie d’un parent dont les enfants vont à un festival. Et pour le moment, je n’ai pas de nouvelles du deuxième. Cela promet !

Pour revenir sur Taylor Swift et avant que j’aille chercher mes enfants je ne sais pas où, si j’y parviens bien sûr, une artiste capable de remplir tous les hôtels d’une ville comme Lyon, c’est quand même dingue je trouve. Jamais les Beatles, les Stones, Madona, Jackson ou même notre Johnny national n’ont eu à mon avis un tel effet sur les services d’hôtellerie d’une ville de plus de un million d’habitants, soit des centaines d’établissements en tout. Le signe d’une époque sans doute, le signe surtout que la musique est un moteur puissant chez les humains, capable de se déplacer en masse et faire des kilomètres et des kilomètres à pied, à vélo ou en avion pour venir assister à un concert ou à un festival. Impressionnant.

Quand on dit que la jeunesse ne se bouge pas les fesses, je ne peux que constater que c’est faux.

ps : mes enfants sont rentrés sains et saufs, à l’heure prévue et avec presque toutes leurs affaires. Je suis fier d’eux 🙂