Bigger than us

Toujours sur le continent nord-américain, un peu plus au sud cependant, le jeune activiste Xiuhtezcatl, connu aussi sous l’initiale X, comme le nouveau nom de Twitter, comme Citizen X, se bat avec l’organisation Earth Guardians pour la préservation de l’environnement. Il a été l’objet d’un documentaire réalisé en 2021 par Flore Vasseur sur ces jeunes qui se battent à travers le monde pour faire de ce monde justement un monde meilleur, qui se battent pour quelque chose qui les dépasse, quelque chose de plus grand qu’eux, d’où le nom du documentaire : Bigger than us (1).

Il y est question notamment de Melati, de parents indonésiens et néerlandais, qui avec sa sœur a eu l’idée de mobiliser leurs camarades indonésiens pour ramasser les sacs plastiques sur les plages de Bali, un fléau en forme de tonneau des Danaïdes, celui qui se remplit aussi rapidement qu’on le vide, puisque l’île reçoit les déchets plastiques du monde entier du fait des courants marins. Son action, si symbolique soit elle, a eu un énorme retentissement au niveau mondial, aboutissant dans un certain nombre de pays à la fin des sacs plastiques gratuits, voire leur remplacement par des sacs papier. A l’époque de cette initiative, elle avant 12 ans, impressionnante de maturité cette jeune Melati !

Mohamad lui est un réfugié syrien au liban. On a un peu oublié la Syrie, l’actualité chassant l’actualité, on a oublié que le printemps arabe là-bas y a été réprimé durement par le régime Al Hassad, toujours au pouvoir aujourd’hui, notamment grâce au soutien de Poutine. On a oublié qu’un tiers de la population a fui dans les pays voisins et y vit toujours dans des camps de réfugiés aux conditions de vie, disons plutôt de survie, indignes. C’est dans ce contexte que Mohamad a créé une école pour tous ces gamins réfugiés qui n’en avaient plus. La réaction des autorités libanaises ? Envoyer les bulldozers et raser le baraquement ! Qu’à cela ne tienne, elle a été reconstruite par les réfugiés et des bénévoles venus d’ici et d’ailleurs, et si elle devait de nouveau être rasée, elle serait de nouveau reconstruite.

Il y a aussi Memory du Malawy – un nom un peu Brice de Nice je vous l’accorde – sauf que le sujet est un peu moins drôle que le surf en Méditerranée. Le combat de Memory est celui des femmes du Malawy, faire en sorte qu’elle puissent avoir un véritable avenir sans faire l’objet de prédation sexuelle ou qu’elles soient mariées de force à 14 ans. Elle a à ce sujet réussi à faire voter une loi imposant un âge minimum de 16 ans avant de pouvoir se marier. C’est un début et c’est surtout un coup de force dans un Etat africain patriarcal. Memory a une telle énergie positive et une telle capacité à rassembler sans se mettre à dos les responsables politiques en place, une vraie compétence quand on veut aller loin, que certains voient en elle la prochaine présidente du Malawy. Seul l’avenir nous le dira.

On y voit aussi Rene, Brésilien, qui a fondé son journal de la Favela à 10 ans pour mettre en lumière la vie des gens qui n’intéressent personne, Winnie, en Ouganda, qui parcours le pays, bêche à la main, pour montrer aux uns et aux autres comment cultiver son jardin avec des moyens rudimentaires mais malins pour tendre vers l’autonomie alimentaire. Et enfin Mary, sauveteuse en Grèce, où s’est justement ouvert le mois dernier un procès hors norme pour non-assistance à personne en danger lors du naufrage du Pylos faisant environ 650 morts. Mary ne se pose pas la question, lorsqu’elle reçoit une alerte, elle fonce avec ses camarades sur le Zodiac et crie « Salam », la paix en français, quand elle arrive à proximité de l’embarcation pour venir en aide aux migrants en train de se noyer. Ils ont pourtant des gilets de sauvetage, il y en a d’ailleurs une vraie montagne sur l’île de Lesbos, mais vous savez quoi ? Ce sont des faux, des putains de fake fabriqués quelque part en Chine et revendu à prix d’or aux migrants par des profiteurs de misère humaine. Vous imaginez ça ? Il y a des gens, des entreprises, qui quelque part dans ce monde, produisent des faux gilets de sauvetages, pour que ceux qui les portent disparaissent sans laisser de trace.

A chaque fois que je vois des images de ce genre de sauvetage, comme celles de Mary, j’ai la gorge serrée, les larmes aux bords des yeux. A chaque fois ! Je ne m’habitue pas. Je repense à ce petit môme échoué sur la plage qui avait fait la une des journaux. Il y a en eu combien d’autres ? Des inconnus. Et combien au fond de la mer ? Et les gens du RN veulent nous faire croire qu’ils viennent de gaité de cœur, des profiteurs. Vous croyez vraiment qu’on prend tous ces risques, de se faire tuer, voler, violer, agresser, de se faire emprisonner, racketter, de se noyer en Méditerranée, juste pour avoir des allocs en France ? Ceux qui disent ou sous-entendent ça sur les plateaux de télé sont des salauds que je voudrais bien les voir avec un faux gilet de sauvetage chinois à cheval sur un radeau de la méduse vendu par des passeurs libyens. Ils feraient moins les malins je te le dis ! Certes on ne peut pas accueillir toute la misère du monde, seulement on ne joue pas avec ça pour se faire élire, c’est indécent.

Je ne vais cependant pas me laisser gâcher la fin de mon billet par le RN, cela me fera par contre une transition avec mon prochain billet puisque l’heure est à l’extrême droite en France et que c’est une séquence unique pour des commentateurs politiques comme moi. Je ne dis pas que je m’en réjouis, au contraire, mais c’est un peu l’heure de vérité qui s’annonce.

L’objectif de ce billet était de mettre en lumière que si une partie de jeunesse vote pour l’extrême droite, il y a aussi une jeunesse qui se bat pour un monde meilleur, et moi je préfère celle-ci.

Sources / Références

(1) Bigger than us, documentaire de Flore Vasseur, 2021