Footballus politicus

Qui a dit que le football n’était pas politique ? Personne ? Eh bien tant mieux car cela aurait été une vraie connerie ! Aucun sport, aucune activité humaine, hormis la politique elle-même, et encore, n’est plus politique que le football. On peut aimer ou ne pas aimer le football, cela ne change rien à l’affaire. Rien n’égale la puissance symbolique du football et l’Euro nous en fait une fois encore la parfaite démonstration.

Le match Angleterre – Ecosse, le maillot ukrainien ou apparaît la Crimée, l’attribution de plusieurs matchs à l’Azerbaïdjan, l’Allemagne qui reprend à son compte la cause LGBT+ en voulant illuminer un stade aux couleurs de l’arc en ciel. Hier soir lors du match Belgique – Portugal comptant pour les huitièmes de finale, toutes les bannières publicitaires, quelle que soit la marque mise en avant, étaient aux couleurs de l’arc en ciel. Et ce n’est pas tout, le manque de diversité au sein de l’équipe italienne, le genou à terre contre le racisme, les résultats misérables de la Turquie faisant office de véritable camouflet pour Erdogan, sans parler de la fameuse Brigade des Carpates, cette bande de supporters fascistes vêtus de noir que la Hongrie a laissé rentrer dans son stade. A travers cet Euro de football, on peut y voir une forme de fracture persistante entre l’Europe de l’Ouest, plus libérale, ouverte et mondialisée et l’Europe de l’Est, plus conservatrice, nationaliste et fermée, comme l’analyse Jean-Baptiste Guégan dans La Marseillaise (1).

Et que dire de l’équipe de France alors que celle-ci a réouvert ses portes à Karim Benzema, ce joueur tant décrié qui après un premier penalty raté, a enfin retrouvé le chemin des filets contre le Portugal. Interrogé sur TF1, le frère de KB9 se disait fier pour Karim tandis qu’un gros malin criait derrière lui, depuis la tribune de Bron, cette banlieue lyonnaise ou le petit Benzema a fait ses armes, Vive l’Algérie ! Le cas « Benzema », ce n’est pas tant l’affaire de la sextape, simple fait divers regrettable, que son rapport à la citoyenneté française, au fait de chanter l’hymne ou pas et à travers lui la relation de la France avec ses anciennes colonies. Le vrai sujet est là. Avec Benzema, on ne se demandait pas simplement si le joueur avait le niveau ou pas, on se demandait aussi si ça ne serait pas bien d’avoir un arabe dans le onze tricolore. Oui mais faudrait pas que ça siffle la Marseillaise quand on rencontre l’Algérie en match amical non plus. Et puis y a aussi Nabil Fékir, et avant lui Zidane, Djorkaeff, c’est déjà bien non ? Oui mais y a quand même beaucoup plus de noirs que d’arabes, c’est pas équitable ! Et alors ?

Il est vrai que l’équipe de France de football, c’est le contraire de l’Italie. C’est une équipe de toutes les couleurs, ce qui a longtemps provoqué des spasmes à Jean-Marie Le Pen, pas assez pour l’achever malheureusement. Les Bleus, de par sa composition, c’est une déclaration politique majeure. C’est un genou à terre permanent, un poing ganté. Voilà la fierté de cette équipe et derrière elle, celle de tout un pays, bon peut-être pas tout le pays, ok, ok, mais une vaste majorité, j’en suis convaincu. En 1998 et vingt ans après, en 2018, des millions de Français sont dans la rue. Pas sur des barricades avec des têtes d’aristocrates au bouts de pics non, des millions de Français pour célébrer la victoire de son équipe à la coupe du monde de football. Cela ne règle pas tous les problèmes non, ça n’en règle même aucun à vrai dire, mais c’est beau putain ! Et puis un pays dont les personnalités préférées sont Omar Sy ou Djamel Debbouze et qui célèbre un gamin de vingt ans issu du neuf trois comme le Messi, un pays comme ça peut-il vraiment être qualifié de raciste ? Question sensible ! Bon je précise que je suis blanc hein. Enfin blanc, mes enfants disent beige. Et les noirs, pour eux ils sont marrons. Ils sont plus précis sur les nuances les enfants. Voilà, tout est une question de nuance, et de flow, ou bien.

Casse la démarche comme Samuel, Samuel Umtiti
Casse la démarche comme Samuel, Samuel Umtiti
Casse la démarche comme Samuel, Samuel Umtiti
Casse la démarche comme Samuel, Samuel Umtiti
Et si y’a drah on peut toujours appeler Benjamin Mendy
Et si y’a drah on peut toujours appeler Benjamin Mendy

Ramenez la coupe à la maison
Allez les bleus, allez
20 ans après c’est le moment
Allez les bleus, allez
Ramenez la coupe à la maison
Allez les bleus, allez
20 ans après on est champion
Allez les bleus, allez… (2)

Références :

(1) « Cet Euro est le plus politique que l’on ait eu depuis la guerre froide », entretien avec Jean-Baptiste Guégan, La Marseillaise, 26 juin 2021.

(2) Ramenez la coupe à la maison, Vegedream

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