# EcologiX

Le Sommet des Dieux

6 juillet 2021

En bon fan de bande dessinée que je suis, dans mon panthéon personnel figure forcément Le Sommet des Dieux (1). Contrairement à ce que son titre pourrait laisser penser, ce manga signé Jiro Taniguchi n’a rien de religieux. C’est en fait l’histoire d’un photographe alpiniste, Fukamachi, qui pense avoir retrouvé l’appareil photo que George Mallory portait avec lui lors de l’expédition de 1924 vers le sommet du mont Everest, le plus haut sommet du monde, le sommet des Dieux.

L’histoire de cette ascension est l’une des plus mythiques du monde de l’alpinisme. En 1924 donc, deux alpinistes anglais, George Mallory et Andrew Irvine, tentent de rejoindre le sommet de l’Everest par la face nord. Ils ne redescendront jamais. Ce qu’on ignore aujourd’hui encore, près d’un siècle plus tard, alors que le corps de Mallory fut retrouvé en 1999 à 8460 mètres d’altitude et que celui d’Irvine est toujours introuvable à ce jour, c’est, ont-ils oui ou non atteint le sommet de l’Everest avant de redescendre et trouver la mort sur le chemin du retour, ou sont-ils morts pendant l’ascension. Et le seul moyen de le prouver, ce serait de mettre la main sur l’un des deux appareils photos que portaient les alpinistes.

Le Sommet des Dieux utilise ce mystère comme fil conducteur pour nous emmener avec les personnages, Habu Joji, Hase Tsuneo et Fukamachi bien sûr, au coeur de la montagne avec un grand M. On s’y croirait tellement, page après page, qu’on serait tenté de mettre une doudoune tant le froid s’infiltre en nous comme l’encre sur le dessin. Le Sommet des Dieux, c’est aussi l’histoire d’une épopée, celle des premiers alpinistes, les Mallory, les Irvine, les Hillary, pour qui il s’agissait d’une véritable aventure, périlleuse, comme l’était la traversée des océans des siècles auparavant, une aventure dont on n’était pas certain de revenir vivant. C’était même plutôt l’inverse, revenir vivant relevait de l’exploit. L’Everest, c’était le Graal, le plus haut sommet du monde, blanc, froid, pur.

Cent ans plus tard, à quoi ressemble l’Everest ? A ça !

Au pied du ressaut Hillary à 8790 mètres
Les tonnes de déchets redescendus chaque année par les Sherpas de l’opération Cash for Trash

Aujourd’hui, l’Everest ressemble à l’entrée d’un supermarché le premier jour des soldes, quand les gens passent sous les grilles à peine ouvertes pour s’arracher des télévisions à moitié prix alors qu’ils en ont déjà deux à la maison.

Ces photos sont issues d’un reportage de Paris Match (2) consacré à Marion Chaygneaud Dupuy, cette Française de 41 ans, qui a passé la moitié de sa vie au Tibet, s’est convertie au bouddhisme et se consacre à présent au nettoyage de cette montagne sacrée.

Quand je vois ça, j’ai envie de chialer, vraiment ! L’être humain est vraiment une machine à tout bousiller. La Terre existe depuis des milliards d’années, l’Everest sans doute aussi, et en quelques années seulement, nous avons transformé ce sanctuaire naturel en une vaste décharge à ciel ouvert. Et c’est comme ça partout. Là où l’homme passe, la nature trépasse.

Je repense alors à Nicolas Hulot quittant le gouvernement d’Edouard Philippe, mon pote de droite, l’air désespéré. Et je le comprends…

Approche-toi petit, écoute-moi gamin
Je vais te raconter l’histoire de l’être humain
Au début y avait rien, au début c’était bien
La nature avançait, y avait pas de chemin
Puis l’homme a débarqué avec ses gros souliers
Des coups de pieds dans la gueule pour se faire respecter
Des routes à sens unique il s’est mis à tracer
Les flèches dans la plaine se sont multipliées
Et tous les éléments se sont vus maîtrisés
En deux temps trois mouvements l’histoire était pliée
C’est pas demain la veille qu’on fera marche arrière
On a même commencé à polluer les déserts

Il faut que tu respires, et ça c’est rien de le dire
Tu vas pas mourir de rire, et c’est pas rien de le dire (3)


Références

(1) Le Sommet des Dieux, Jiro Taniguchi, Kana eds, 2010

(2) Marion Chaygneaud-Dupuy, la madone de l’Everest, Paris Match, 17-22 juin 2021

(3) Mickey 3D, Respire

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