# CinémiX

Président(s)

19 juillet 2021

J’en ai vu des films loufoques mais celui-là il s’impose là. Jean Dujardin dans le rôle de Nicolas Sarkozy et Grégory Gadebois dans celui de François Hollande, il fallait oser. Anne Fontaine, à qui l’on doit des films aussi variés que Coco avant Chanel, Gemma Bovery ou encore Police, a osé.

L’histoire est simple. Nicolas s’emmerde à Paris, sa cantatrice de compagne lui perce les tympans mais il ne l’entend plus de toute façon. Francois s’emmerde en Corrèze, sa compagne véto l’a reconnecté à la vraie vie après que celui-ci a enfoncé la préfecture à coup de tracteur. Je ne sais pas s’il était en contact avec le gang du Fenwick, celui qui a défoncé le portail de Benjamin Griveaux, l’ex porte-parole d’Emmanuel Macron, obligeant celui-ci à s’enfuir par la fenêtre et toute la police scientifique de Paris à remonter leur piste, en tout cas le François a fini au CHU de Limoges pendant deux mois. Confiné le François qu’il était.

Repensant à la rencontre De Gaule Mitterrand, Nicolas a l’idée, face à la montée dans les sondages de Marine Le Pen, de convaincre François Hollande de faire campagne avec lui pour les Présidentielles, voilà le pitch de départ.

On pourrait rire de cette bouffonnerie, d’ailleurs on rit vraiment, j’avoue, car les répliques sont bien écrites, mais on se dit, au fond, la réalité ne rattrape t-elle pas la fiction ? L’élection présidentielle, la vraie, n’est-elle pas un vaste diner de cons où les cons c’est nous, les Français ? Un dîner de con ou un vaudeville, c’est selon les élections et les candidats. Dominique Strauss-Kahn, futur favori, écroué pour viol. François Hollande, sur lequel personne n’aurait misé un kopek, élu en 2012, dont la vie sera étalée à longueur de roman par son ex-compagne. Il y avait l’homme à la tête de chou, il y avait désormais l’homme à la tête de casque. Marine Le Pen, qui d’élection en élection se sert de la notoriété de son patronyme, véritable marque de fabrique sans doute déposée à l’INPI, pour vendre des kits de campagne à vil prix à tous ses partisans, pour remplir les caisses de son parti, et les siennes par la même occasion. François Fillon qui alimente son entreprise familiale à coups d’emplois fictifs. Mélanchon, candidat semi-communiste et deuxième plus gros patrimoine personnel à l’élection de 2017. Emmanuel Macron, ce jeune homme venu de la gauche qui gouvernât avec deux premiers ministres de droite, va comprendre Charles, avec le tiercé on joue comme on aime.

En 2022, ce sera le même cinéma, re-belotte. Nous aurons le choix entre un deuxième tour de manège avec Emmanuel, s’il décide de se présenter. Sinon faudra faire avec le candidat de la droite, qu’il s’agisse de Xavier Bertrand ou d’Edouard Philippe, que ses amis surnomment barbe noire, et ses ennemis barbe blanche, ça dépend du profil vers lequel il se tourne. Et si les Français en ont vraiment marre de ce cirque infernal, ils voteront Marine Le Pen, depuis le temps qu’on en parle, cela finira bien par arriver, comme Trump aux Etats-Unis, Johnson en Angleterre ou Bolsonaro au Brésil. Vous aurez remarqué que je n’évoque ni Valérie Pécresse ni Anne Hidalgo, qui à mon avis, sorties de Paris n’ont aucune chance. Et je le regrette.

Car à l’instar d’Anne Fontaine, j’aimerais bien voir une femme présidente de la République française, ne serait-ce que pour voir si ça change la donne. Anne Fontaine a jeté son dévolu sur la véto de campagne, interprétée par Pascale Arbillot, de plus en plus belle depuis Les Petits Mouchoirs. Une femme douce et dure à la fois, capable de faire accoucher une vache en difficulté ou tirer sur un Palestinien (elle est censée avoir passé quatre ans au sein de Tsahal, drôle d’idée pour un personnage qui n’est ni juive ni israélienne, mais bon admettons), mais surtout une femme qui connaît le terrain, la vraie vie et dont les paysans alentours ont bien besoin.

Seulement voilà, chère Anne Fontaine, une telle femme candidate à la présidentielle, ça n’arrivera jamais. Parce qu’il lui faudrait tout abandonner, et donc trahir ceux qui ont besoin d’elle au quotidien, parce qu’il lui faudrait monter un parti, on ne conquiert pas le pouvoir tout seul avec ses ptits bras et ses ptites jambes, parce qu’il lui faudrait beaucoup d’argent pour financer tout ça, parce qu’elle se ferait lyncher sur les réseaux sociaux, et sa famille avec, parce qu’il faut être fou pour se lancer dans pareille aventure quand on est un citoyen ordinaire, ou plutôt une citoyenne ordinaire.

Non, cette véto resterait là où elle est utile et heureuse, et son mari la regarderait, comme Gregory Gadebois, en chantant :

Moi je n’étais rien
Et voilà qu’aujourd’hui
Je suis le gardien
Du sommeil de ses nuits
Je l’aime à mourir

Vous pouvez détruire
Tout ce qu’il vous plaira
Elle n’a qu’à ouvrir
L’espace de ses bras
Pour tout reconstruire
Pour tout reconstruire
Je l’aime à mourir

Elle a gommé les chiffres
Des horloges du quartier
Elle a fait de ma vie
Des cocottes en papier
Des éclats de rire

Elle a bâti des ponts
Entre nous et le ciel
Et nous les traversons
À chaque fois qu’elle
Ne veut pas dormir
Ne veut pas dormir
Je l’aime à mourir (1)


Références

(1) Je l’aime à mourir, Francis Cabrel


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