# SociétiX

Tous accros ?

16 octobre 2024

Si je vous dis tous accros ? Vous pensez à quoi ? A la même chose que vous gros dégoûtant ! Répondait Coluche dans son sketch sur le Schmilblick à la question est-ce qu’on peut se tripoter le Schmilblick tout seul dans sa tente ? Mais il ne s’agit pas ici de sexe, ni d’alcool, ni de produits psychotropes quels qu’ils soient, qu’ils se fument, s’avalent ou s’injectent. Il s’agit d’un phénomène de société plus récent, lié à l’innovation des ingénieurs et entrepreneurs de la Silicon Valley, dont un plus malin que les autres, Steeve Jobs, qui n’est plus là pour observer les dégâts faits par son invention du diable : le smartphone ! Il en connaissait néanmoins les dangers et avait interdit à son propre fils d’en utiliser un jusqu’à ce que celui-ci puisse se passer de la tutelle de son génie de père. La réponse est donc simple, et c’est oui, nous sommes tous accros aux écrans, montres, téléphones, tablettes, ordi, consoles, télévisions, casques de réalité virtuelle sur lesquels nous pouvons faire des milliers de choses sans bouger de notre canapé ou de notre plumard.

Le magazine Cerveau & Psycho y consacre un dossier dans son numéro du mois d’octobre (1). On comprend, planche de dessin à l’appui, qu’il existe une zone dans le cerveau appelée le striatum qui envoie des décharges de dopamine lorsqu’elle est activée et c’est exactement ce qui se passe avec les apps de notre smartphone, qui sont agréables, rapides et ont un coût cognitif faible, c’est à dire peu d’effort intellectuel à fournir. Dit autrement, les smartphones nous shootent de dopamine à coups d’images, de comparaisons sociales, jeux et distractions en tous genres. A l’inverse, les activités de type 2 tels que les apprentissages scolaires, les tâches administratives ou professionnelles qui sont peu distrayantes la plupart du temps, dont le bénéfice se mesure à long terme et le coût cognitif (effort) est plus élevé, génèrent peu de dopamine. Le choix entre plaisir à court terme et bénéfice à long terme est donc vite fait, et ce sera le plaisir ! Et c’est encore pire pour nos enfants et ados dont le cerveau est en construction. Un adulte qui a grandi et s’est façonné sans les écrans, ou peu, personnellement jusqu’à mes vingt ans, le seul écran à ma disposition était la télé et j’avoue en avoir beaucoup consommé, je me souviens par exemple avoir passé une semaine complète de vacances à Noël en robe de chambre chez mes grands parents à me gaver de Sissi Impératrice, Angélique Marquise des anges, Club Dorothée et compagnie. Et franchement, j’étais heureux. A côté de ça, je faisais pas mal de vélo, de basket, de sorties avec les copains, sans oublier l’école où il n’y avait pas d’ordi, donc globalement ma vie était assez équilibrée malgré quelques déséquilibres ponctuels, j’avoue. Sans compter la robe de chambre, mais c’était une autre époque et il n’y aucune photo qui le prouve, vous pouvez chercher.

Le problème c’est que depuis la techno a évolué et j’ai une montre connectée, un smartphone évidemment, un ordi sur lequel je travaille et j’écris ces chroniques, une tablette où je lis la presse, numérique évidemment, ma mère aussi d’ailleurs, elle n’achète plus ses magazines préférés, ou rarement, et les lit sur mon appli. A la maison, nous avons une télé géante, un vidéo projecteur qui projette au mur des images encore plus grandes que sur la télé, des consoles de jeux pour les gamins, des ordis, des smartphones, à nous tous le nombre d’écrans disponibles se compte par dizaines, une véritable folie cognitive. Nous avons bien tenté de résister, nous avons d’ailleurs assez bien résisté jusqu’au collège, mais à partir du collège, tout est parti en cacahuète, la consommation d’écrans de nos ados a explosé et toute tentative de reprendre la main finit en disputes et en cris. Nous parvenons encore à récupérer le portable de notre fille qui est en 3e à partir de 22h, mais nous avons abandonné la partie avec notre fils qui vient de rentrer au lycée, disons que nous lui faisons confiance pour nous donner bonne conscience alors qu’en vérité nous n’avons absolument pas confiance en sa capacité à résister à l’appel des écrans, et pour cause, nous disent les spécialistes du cerveau, puisqu’avec son cerveau encore en chantier, plus que jamais même, adolescence oblige, impossible de résister à un petit shoot de dopamine, quelle que soit l’heure, surtout si tous les potes y sont aussi, sur les réseaux. Autant le dire tout de suite, la bataille est perdue, la guerre aussi.

Reste à prier pour que, en grandissant, en mûrissant, ils s’aperçoivent eux-même de leurs excès et des effets néfastes que cela produit sur leur santé physique et mentale. Et comme un certain nombre de parents aussi débiles (débil en espagnol signifie faible) que nous, nous nous apprêtons à brandir notre carte jocker : un chien ! Eh oui un chien, un vrai chien, qui a vraiment besoin de sortir dehors dans la vraie vie, voir d’autres vrais chiens, faire des vrais pipis et de vrais cacas qu’il faut ramasser avec de vrais sacs poubelles prévus à cet effet. Le résultat on le connaît déjà, cela va marcher et les faire marcher au début, puis ils vont se lasser et ce sera à nous d’aller jouer avec le toutou. Tant pis pour eux après tout, quand j’étais môme et que j’en avais marre de Sissi et d’Angélique, si si ça arrivait quand même, je sortais et j’allais promener mon chien dans la campagne pendant des heures. Peut-être les plus belles heures de ma vie, les plus simples en tout cas. Alors fuck les écrans et vive les chiens !


Sources / Références

(1) Tous accros aux écrans ? Cerveau & Psycho, n°169, octobre 2024

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