# CitizenX

Dis papa

14 juillet 2021

Après la deuxième injection du vaccin, j’ai eu un coup de mou. Un vrai coup de mou, fatigué, envie de dormir toute la journée, le nez bouché, mal à la tête, bref la totale. Cela n’avait peut-être rien à voir, mon fils avait eu un gros rhume quelques jours avant, peut-être me l’a-t-il refilé. On ne saura jamais. Mais ce n’est pas le sujet de ce billet, qui pourrait alimenter la polémique sur la vaccination et donner un argument aux sceptiques ou aux antivax.

Le sujet de ce billet, c’est la paternité ou plus généralement la parentalité, ne soyons pas sexiste. Me voyant ainsi diminué, allongé sur mon lit, mon fils, qui a douze ans et n’est donc plus tout à fait un enfant et pas encore vraiment un ado, s’inquiète et me demande : « Dis papa, tu ne vas pas mourir, hein ? » Bah non, quelle idée saugrenue, c’est juste un gros rhume, ne t’inquiète pas mon grand. Puis ça m’a fait cogiter. Je me suis dit, et qu’est-ce que j’en sais moi si je ne vais pas mourir, là tout de suite, ou cette nuit, ou dans les jours qui viennent. Après tout, je n’en sais rien du tout. On est dans une période où on est en droit d’en douter. Il y a des gens de mon âge (la quarantaine fringante), en parfaite santé apparente, qui sont morts du Covid. Certes, ce ne sont pas les plus nombreux, mais statistiquement c’est possible. Je peux aussi mourir d’un AVC, d’un arrêt cardiaque ou d’une maladie auto-immune à la con, c’est bien arrivé à une connaissance. Le lundi, il était en vacances et heureux, le mercredi il était mort, ses anti-corps s’étaient ligués contre lui. Affreux.

Je me suis dit, si je devais mourir demain, je n’aurais pas eu le temps de leur dire tout ce que j’avais à leur dire, leur donner des conseils, les encourager, les soutenir et les accompagner vers leur destin à eux. Le vertige.

Mon fils s’inquiète pour moi, le monde à l’envers.

Devenir parent, c’est vraiment la plus grande aventure qui soit. A l’instant où votre enfant nait, vous comprenez que votre vie ne sera plus jamais la même. A chacun de leurs pas, vous vous inquièterez qu’ils ne trébuchent pas. Vous vous direz, s’ils tombent ce n’est pas grave, c’est ça la vie, tomber et apprendre à se relever, mais au fond de vous, vous souhaiterez les protéger à tout prix. Ils grandissent et le temps ne change rien à cet état. Quand ils feront du vélo, vous vous inquiéterez, quand ils iront tout seuls à l’école, vous vous inquiéterez, quand ils passeront leur permis et prendront pour la première fois le volant, vous vous inquiéterez. Etre parent, c’est s’inquiéter tout le temps. Cela permet ainsi de mieux comprendre ses propres parents et de s’apercevoir qu’ils ont fait de leur mieux pour que nous soyons heureux. Et on s’inquiète aussi pour nous, si je mourais demain, que deviendraient-ils ? Car on fait ce qu’on peut, pas toujours ce qu’on veut.

Si je devais mourir demain, je voudrais dire à mes enfants de parcourir le monde, même s’ils ne sont pas les bienvenus partout. Car parcourir le monde leur ouvrira l’esprit, ils découvriront des paysages fantastiques, des cultures et des vie différentes de la leur et cela les rendra infiniment plus tolérants et intéressants. Je leur dirais d’aller à la rencontre des autres, ici ou là, ici et là, car si la vie m’appris une chose jusqu’ici, c’est que les rencontres vous enrichissent. Et on fait parfois des rencontres extraordinaires juste à côté de chez soi. La semaine dernière, je cherchais un photographe pour offrir un cadeau. Je contacte une ancienne copine de lycée, qui après une première partie de carrière dans le web, est revenue à sa passion initiale : la photographie. Débordée par la vague de mariages post-Covid, celle-ci me renvoie vers un confrère. Je débarque chez le confrère en question, il me demande ce que je souhaite, m’explique son offre, fait la déballe. Puis mon regard est attiré par les photos autour de lui. Je vois une femme et son chien. Il s’arrête, voit que je ne l’écoute plus, puis me raconte. Je suis le photographe de l’association Gamelle pleine, qui donne à manger gratuitement aux compagnons d’infortune des sans domicile fixe. Cette femme que vous voyez derrière moi a perdu son chien. Elle l’a enterré dans un terrain vague. Le lendemain, une pelleteuse retournait tout. Une semaine plus tard, elle se pendait. Silence assourdissant. Puis nous avons enchaîné sur les reporters de guerre, puis passant du coq à l’âne, la photographie naturaliste et animalière. J’étais rentré pour un simple cadeau, finalement je suis resté près d’une heure et j’ai découvert un monde, son monde. Le cadeau, c’est lui qui me l’a fait. Des rencontres comme celle-ci, à la fois simples et uniques, c’est ce qui fait le sel de la vie. Faites des rencontres, mes enfants !

Je reviens à ma copine de lycée revenue à sa passion de jeunesse. Combien de gens comme elle changent de métier après s’être aperçu qu’ils ne faisaient pas ce qu’ils aimaient ? Et combien ne changent jamais alors qu’ils n’aiment pas ce qu’ils font ? Quand on a des enfants, ce qu’on souhaite pour eux, c’est qu’ils réussissent à trouver un métier ou une occupation, si possible rémunérée, eh oh on ne vas les entretenir toute leur vie non plus hein, qu’ils aiment. Confucius disait, faites un métier que vous aimez et vous n’aurez pas à travailler un seul jour de votre vie. Facile à dire, me rétorquerez-vous et vous aurez raison car il est parfois difficile de savoir ce qu’on aime vraiment. D’autant qu’aimer ne suffit pas. Vous pouvez avoir envie d’être médecin ou architecte, mais si vous êtes nul à l’école, ça ne va pas être simple. Autant dire les choses comme elles sont, ce ne sera pas possible. Mais il y a une voie pour chacun et il ne faut pas se tromper de motivation. Si vous faites un métier uniquement pour l’argent, il est peu probable que vous vous y épanouissiez complètement et surtout durablement. Choisissez un métier que vous aimez les enfants !

Je voudrais surtout vous dire de prendre soin de vous et de ceux que vous aimez, moi en particulier, car quand je serai vieux, j’aurais besoin de vous. Ah bah non, je suis censé être mort depuis longtemps, je suis con !

Prenez soin de vous mes chéris, soyez ambitieux, travaillez dur pour atteindre vos objectifs, ne laissez pas les autres vous dicter votre chemin, soyez cool, soyez heureux.

Je vous aime.

Papa

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