Un parlement en toc

Dans un peu plus d’un mois, nous serons amenés à nous rendre de nouveaux aux urnes pour élire nos députés. Mais la question reste la même que pour l’élection présidentielle : tout ça est-il bien utile ? La question pourra faire bondir les défenseurs de la démocratie sur le papier, elle n’en demeure pas moins sensée vu l’impuissance chronique du parlement vis à vis du pouvoir exécutif. Les anciens députés, vieux de la vieille et de la veille, font avec, ils se sont fait une raison et puis la place est bonne à prendre malgré tout, avec ou sans ou pouvoir réel, demandez à la famille Fillon ce qu’ils en pensent.

Pour les jeunes députés en revanche, et quand je dis jeune, ce n’est pas forcément de leur âge dont il s’agit, mais plutôt de leur expérience à ce poste, la douche est froide car ils viennent avec le sac à dos plein d’un certain idéalisme, une envie de changer le monde, en mieux, et pas seulement pour se contenter de cirer les bancs de l’Assemblée jusqu’à pas d’heure en appliquant scrupuleusement les consignes de vote. C’est tout particulièrement vrai dans les rangs de La République en Marche (LREM), qui en 2017, avait recruté bon nombre de candidats parmi la société civile, des gens comme vous et moi donc, des gens ordinaires n’ayant aucune connaissance du fonctionnement de l’Assemblée Nationale ni de celui d’un parti politique, quel qu’il soit.

Après Frédérique Dumas qui a raconté son expérience amère de députée LREM dans un livre très sévère à l’égard d’Emmanuel Macron et de sa garde rapprochée (1), c’est au tour d’Annie Chapelier, députée de la quatrième circonscription du Gard, de dégainer le sien de bouquin (2) pour dénoncer l’incapacité du Parlement à agir et l’attitude méprisante et ridicule des petits cadres du parti présidentiel.

Infirmière de profession née au Canada, Annie Chapelier avait rejoint LREM lors des législatives 2017 et avait été élue en battant le Parti Socialiste au premier tour et le Front National au second. Une belle victoire électorale qui annonçait de belles avancées pour l’avenir de France et des Français, c’est du moins ce qu’elle croyait, ce pour lequel elle s’était engagée. Mais très vite, c’est la désillusion, elle se rend compte que tout ça n’est qu’une farce et qu’elle tient le rôle de la dinde, farcie aux Macrons. Le groupe parlementaire En Marche est télécommandé depuis l’Elysée comme un môme jouerait avec le bolide qu’il a eu pour Noël. Déçue, elle démissionne du parti en 2020 pour rejoindre le groupe Agir ensemble. Elle nous livre ici son bilan d’un quinquennat qui fait pâle figure, dénonçant le poids des lobbies, le peu de pouvoir réel accordée aux députés et aux femmes (imaginez si vous êtes une femme députée) et surtout un parti majoritaire composé de petits soldats sous l’autorité quasi unique du général en chef Macron 1er. Caricature ? Il suffit pour s’en convaincre de voir comment et par qui sont validées l’ensemble des investitures LREM dans les 577 circonscriptions que compte la France pour cette édition 2022. Par le Président de la République himself, comme s’il n’avait pas d’autres chats à fouetter, entre la Guerre en Ukraine et l’hyper inflation des prix à la consommation, que de savoir si c’est Micheline ou Jean-Pierre qui va se faire le tour des patelins de la Creuse. Il nous a promis une nouvelle ère démocratique pour son second mandat, force est de constater que ça démarre mal.

Alors pour qui voter ? Pour l’attelage France Insoumise – Parti communiste français ? Déjà, petite parenthèse rapide, comment peut-on encore s’appeler « Parti communiste » en 2022, après les horreurs commises au nom du communisme au XXème siècle ? Quant au communisme du XXIème siècle, à la chinoise par exemple, ce pays où on visse les portes des gens qui risquent d’avoir le Covid et on euthanasie les animaux domestiques de ceux qui l’ont, alors qu’en France, on n’a même pas le droit de faire pareil avec les vieux Alzeihmer, est-ce que c’est ça le modèle de société qu’ils nous promettent au PCF ? Et je ne parle pas de la Corée du Nord, vous l’aurez remarqué. Bah non ducon, avec Fabien Roussel, c’est la France des jours heureux – ah oui pardon j’avais oublié Charles Trénet, désolé ! Devons-nous suivre Mélenchon, le député de Marseille qui habite Paris, spécialiste du tripatouillage électoral depuis quarante ans ? Et surtout pour faire quoi ? J’en discutais ce matin avec mon pote Mika, qui me disait, qu’il s’agissait de pouvoir faire barrage aux lois de LREM. Faire barrage ? C’est ça la politique en France, faire barrage ? Tu fais quoi là, avec tes petits bras ? Bah je fais barrage mon gars ! Ah !

Je crains que de savoir 1/ Ce que l’on ne veut pas qu’elle nous dise et 2/ que le Parlement qu’on nous vend depuis des siècles n’est pas en marbre mais en toc, ne me redonnera pas confiance en ceux qui dirigent ce pays, qu’ils soient législateurs ou exécuteurs. D’autant que l’Assemblée Nationale n’est que la fasse immergée du Parlement. Il ne faudrait pas oublier le Sénat, qui a tout autant de non-pouvoir, ou alors le pouvoir de ne pas faire avancer les choses, au moins pendant la sieste, que l’Assemblée. C’est pourquoi, n’en déplaise à Annie Chapelier, réformer l’Assemblée sans réformer le Sénat, n’aurait aucune utilité. Il faut revoir l’ensemble du système législatif pour qu’il soit plus fort, plus efficace, plus rapide et surtout plus démocratique et réellement représentatif (relire Nous Président, idée #1).

En attendant, n’ayant pas l’intention de me faire imposer un second vote Macron en deux mois, je vais devoir faire un autre choix, ou pas.

Notes / Sources :

(1) Ce que l’on ne veut pas que je vous dise, Frédérique Dumas, 2022

(2) Un Parlement en Toc, Annie Chapelier, Editions Nombre 7, 2022