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Ado sans portable

17 janvier 2024

Paraît-il qu’on devient adulte quand on a pardonné à ses parents. C’est tout du moins ce que pense Isabel Allende, l’autrice chilienne bien connue. Nos enfants nous pardonneront-ils de leur avoir acheté un smartphone trop tôt et ensuite de les avoir laissés passer leur vie dessus ? Je n’en sais rien. Je suis comme tous les parents d’ados de ma génération, ceux qui ont une quarantaire d’année, tout dépend à quel âge vous vous êtes aventuré dans cette folie de la parentalité, je suis dépassé, inquiet, d’autant que je ne montre pas le bon exemple en étant moi même hyper connecté avec un téléphone, un ordinateur, une tablette et une montre, sans parler de l’écran taille XXL qui trône dans le salon. Comment demander à mes ados, qui aspirent à devenir adulte rapidement comme tout bon ado qui se respecte, de limiter les écrans ? Un parfait exemple s’il en est du fameux, fais ce que je dis et pas ce que je fais, un principe universel et intemporel.

J’ai encore en tête la présentation du tout premier iPhone par Steeve Jobs, le fondateur d’Apple. Je dis l’iPhone mais je devrais dire les iPhones car la petite histoire raconte que la batterie ne tenait pas sur toute la durée de la présentation. Le patron de la pomme a donc eu l’idée astucieuse d’utiliser plusieurs téléphones différents, tous les mêmes, mais pas le même, ni vu ni connu, je vous embrouille, voyez la révolution que je vous présente : un iPod (baladeur numérique), un téléphone portable et un navigateur internet. Un iPod, un téléphone portable et un navigateur internet. Un iPod, un téléphone portable et un navigateur internet, il le répète trois fois. Tout ça pour bien faire comprendre qu’il ne s’agit pas de trois appareils différents mais d’un seul et même appareil, révolutionnaire : l’iPhone ! Né au début du XXIe siècle, l’iPhone est sans aucun doute avec l’imprimerie l’une des grandes inventions de l’Histoire, avec une grande hâche, en tout cas l’innovation qui a fait passer l’Homme, avec un grand H, dans une nouvelle ère. Après l’homo habilis, l’homo erectus, l’homo heidelbergensis (peu connu), l’homme de Néanderthal (plus connu) et l’homo sapiens (très connu car c’est nous dont il s’agit), voici venu le temps de l’homo mobilus, l’homo vissé à son mobile quasiment jour et nuit.

Face à cette révolution technologique, partout sur la planète, les parents s’inquiètent, notamment en Espagne, où un collectif s’est créé pour interdire l’usage du téléphone portable en dessous de 16 ans et le bannir totalement de l’école. Emmanuel Macron lui-même, dans sa dernière conférence de presse, a annoncé vouloir en limiter l’usage. Les politiques ont ce talent de vouloir, d’avoir des intentions, sans que cela soit en général suivi d’effet, et pour cause, car la tâche est immense, l’Everest par la face nord et en tongs. A moins de s’appeler Xi Jinping et d’être dictateur chinois, difficile en effet de contraindre cette armée de jeunes gens enragés (les ados) d’abandonner leur doudou numérique. A la maison, c’est une vraie guerre pour nous les parents quand nous décidons de récupérer les « écrans », téléphone, ordi, console, faut généralement s’y reprendre à dix fois et faut être maître zen pour ne pas s’énerver. Et je ne parle que de deux spécimens, les miens. Alors vouloir légiférer pour toute la France, faut être naïf, rêveur ou complètement fou. Ou politique, celui qui promet la lune tout en sachant que cela n’arrivera jamais, quand on lui montre la lune, le citoyen lambda a tendance à ne voir que le doigt tendu. Quel doigt ? Cela reste à définir.

Non, soyons honnêtes et réalistes, impossible de revenir en arrière car le train est lancé et à toute vitesse. L’école elle-même est aujourd’hui numérique, les devoirs, les notes, les cours, les discussions avec les profs, tout se passe en ligne désormais. Pas un jour ne passe sans que je reçoive une alerte sur mon téléphone comme quoi mon fils a enlevé ses chaussures en maths, ma fille n’a pas fait ses devoirs, mon fils a pris deux entrées, ma fille rigole, mon fils fait des moulinets avec ses bras en français. Vous vous dîtes peut-être que mes ados sont des excités, intenables, moi je me dis que je n’ai pas envie de savoir tout ce qui se passe à l’école. Si mes parents avaient dû avoir un compte rendu de toutes les bêtises que j’ai pu faire de la maternelle à la terminale, ils auraient vite démissionné. C’est bien simple, l’école nous harcèle numériquement. On veut des ados sans portable, sans écrans, qu’on commence par enlever celui des profs et de l’institution, qu’elle soit publique ou privée (celle-ci est pour Amélie, vous l’aurez compris) !

J’insiste, on n’arrête pas un train en marche. D’autant que la dernière trouvaille s’annonce elle aussi comme une révolution, un tsunami technologique, je veux bien entendu parler de l’intelligence artificielle (IA), et notamment de Chat GPT. Chat GPT n’en est qu’à ses début et il est déjà bien plus puissant que Google pour répondre à vos questions. Par exemple, pour ma chronologie sur l’homo, plus haut, je me suis aidé de Chat GPT. En trois secondes, montre en main, il m’a sorti ladite chronologie avec un petit résumé des principales caractéristiques de chaque homo. Il y a trente ans de cela, j’avais 18 ans et je tentais d’escroquer les gens en leur vendant l’encyclopédie Universalis en porte à porte. A l’époque, on considérait qu’il y avait TOUT dans l’encyclopédie, en tout cas, c’est ce que je racontais aux gens. Si je prenais une de ces encyclopédies du XXe siècle et tentais d’y trouver la même information, il me faudrait au moins plusieurs minutes et je ne suis même pas certain que j’aurais la même précision. Ce n’est ici qu’un exemple très simple, les applications de l’IA sont incroyables et infinies, alors croire que l’on va pouvoir arrêter le progrès, ou même le freiner, c’est illusoire et contre-productif. Mieux vaut tenter de s’y adapter. Là est la vraie force de l’homo, s’adapter à des conditions qui changent. Les animaux aussi le font très bien. Ceux qui n’y parviennent pas crèvent, c’est Darwin qui nous l’enseigne.

Ce qu’il est possible de faire avec ses ados, c’est de limiter le temps d’écran, tant bien que mal, et proposer d’autres activités, tant bien que mal également, du sport, des balades, de la cuisine, du bricolage, que sais-je, ce qui est certain c’est que qui ne propose rien n’a rien. Rien ne change si rien ne change. Limiter et proposer.

Je dis ça mais je galère comme c’est pas permis pour le mettre en application. Encore et toujours le fameux, faites ce que je dis…

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