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Chats de hasard

28 janvier 2024

Je vous ai déjà raconté l’histoire de mon chat Misti, pour ne pas dire Mystique, alias Schrödinger, qui n’avait plus de globules dans le sang et pourtant était restée en vie, une vie qu’elle a poursuivi pendant plus d’un an jusqu’à ce que la réalité rattrape la fiction et que je doive la faire euthanasier, une première pour moi, j’espère la dernière.

L’actrice Annie Duperey a écrit un livre sur ses chats intitulé Les chats de hasard (1). Pourquoi des chats de hasard ? Parce que jamais elle n’est aller les chercher, toujours ils sont venus à elle, par hasard. Je vais vous raconter l’histoire de mes chats de hasard.

En réalité, j’ai passé les premières années de ma vie avec un chien, plus exactement une chienne, une braque allemande qui s’appelait Roxane, comme la limonade éponyme. Il y avait aussi Neige, le Boxer, avec qui je partageais mes biscuits et elle son panier. Enfant unique, les chiens étaient peut-être des frères et soeurs de substitution. Ils me comprenaient, je les comprenais. Roxane est morte à 7 ans d’une sorte de cancer, remplacée par Calhoun, un setter anglais qui portait le même nom qu’un général américain. Un mâle un peu teigneux, impossible à garder en ville, il sautait rageusement sur tous les chiens qui passaient à proximité. Direction la ferme des mes grands parents à la campagne. C’est alors que nous sommes passés, mes parents et moi, aux chats, par hasard.

Ma mère avait trouvé lors de sa tournée, elle était factrice, un bébé chat tout noir qui traînait dans la rue et les buissons sans savoir où aller ni comment se nourrir, des chats comme il y en a tant, ici et ailleurs. Ni une ni deux, elle l’embarque à la maison et nous ferons un voyage de près de vingt ans ensemble, une longévité extraordinaire vu qu’elle avait contracté le sida du chat et avait elle aussi frôlé la mort à plusieurs reprises. Elle a eu plusieurs portées dont une surprenante puisque certains de ses bébés étaient tout blancs alors qu’elle était toute noire. Nous en avons gardé un parce qu’il était sourd, nous voulions continuer de prendre soin de lui. Ce que nous avons fait, jusqu’à ce jour où, le jour de mon premier cours de conduite, je m’en souviendrai toute ma vie, je roule sur un chat écrasé, un chat blanc, mon chat. Ce fut un drame.

Plusieurs années après avoir quitté la maison familiale, j’étais en échange universitaire au Mexique, je suis réveillé en plein nuit par un chat famélique, qui miaule à ma fenêtre, un chat de six ou huit mois tout au plus. J’aurais pu le chasser mais ce n’est pas mon genre, vous l’aurez sans doute compris en lisant ce billet. Au contraire, je le fais rentrer et il est resté avec moi pendant toute mon année mexicaine. Je l’ai même emmené chez le vétérinaire une fois, ayant observé une boule bizarre dans le coup de l’animal. Il s’agissait en fait d’un plomb, certaines mauvaises âmes l’ayant semble-t-il pris pour cible. Ne pouvant ramener un chat du Mexique sans une quarantaine, je l’ai confié à une amie.

Une mauvaise âme, j’en croiserai une autre quelques années plus tard. Un chat de quartier que l’on avait appelé Grisou, non en raison de sa ressemblance avec Antoine Griezmann, mais du fait de son pelage gris et blanc. Un chat d’une gentillesse… Il venait tous les jours à la maison, ce qui faisait la joie de nos enfants en bas âge quand ils ne lui tiraient pas sur la queue ou les moustaches, lui ne disait jamais rien, il se laissait martyriser en souriant. Un jour sans le voir, puis deux, trois, quatre, une semaine, l’inquiétude. J’apprends alors dans le journal qu’un psychopathe, un psychocat, avait sévi dans le quartier et avait été arrêté après des semaines de traque. On parlait de plusieurs dizaines de chats torturés et tués. En plus ce type avait ses enfants dans la même école que les miens, si ça se trouve je le connaissais. Valait mieux pas que je le croise, pour lui !

Une amie à nous nous a alors dit qu’une amie à elle avait une chatte errante qui avait eu une portée dans le fond de son jardin et elle cherchait une solution pour ne pas à avoir à chercher une autre solution, moins plaisante. C’est comme ça que nous avons adopté deux petites jumelles, Mia et Misti, une toute noire et une toute grise.

Misti est partie et cette semaine un jeune chat dont le pelage angora rappelle celui de Misti a débarqué. Je ne le connais pas, il ne me connait pas mais il suffit que je m’assoie sur les escaliers devant la maison pour qu’il me monte sur les épaules pour frotter sa tête contre la mienne.

Je ne sais pas s’il faut croire en Dieu, en tout cas, moi je crois dans les chats de hasard.


Source / Référence

(1) Les chats de hasard, Annie Duperey, Seuil, 2003

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