# PolitiX

Le Barnier de Séville

24 septembre 2024

La fumée blanche est enfin sortie des cheminées de l’Elysée, c’est bon, Habemus Gouvernementum ! Alleluia, nous avons un gouvernement. Que dire ? Euh… que Dal ! Si ce n’est ceci.

Cela fait bien longtemps que je ne crois plus dans la politique politicienne. J’ai voté à gauche et j’ai vu. J’ai voté à droite et j’ai vu. J’ai voté au centre et j’ai vu. J’ai voté pour des vieux singes et j’ai vu. J’ai voté pour de jeunes singes et j’ai vu. J’ai passé un an au Parti Socialiste et j’ai vu. Je ne dirais pas que j’ai tout vu mais j’en ai vu assez pour savoir. Savoir que la politique est un show, un one-man show la plupart du temps, un seul-en-scène dirait-on en bon françois, un spectacle, une pièce de théâtre.

Seulement Barnier n’a rien du Barbier de Séville, à savoir Figaro, un nom qui plaît pourtant bien à la droite traditionnelle. Figaro, c’est donc ce barbier rusé et débrouillard qui aide le comte Almaviva à conquérir la belle Rosine, que convoite aussi le vieux et cupide docteur Bartholo car la jeune femme est riche. Voilà qui a du panache, il y a de l’amour, de la ruse, une satire sociale avec la critique des privilèges de la noblesse et la malice des classes populaires au travers de ce fameux personnage qu’est Figaroooo, comme disait feu Jean D’Ormesson.

On a eu des hommes politiques romanesques dans le passé, et même le passé récent, Emmanuel Macron n’est-il pas une sorte de Rastignac du XXIème siècle ? Avant lui, et pour ne prendre que la Cinquième République, nous avons eu De Gaulle, le personnage historique, qui a connu deux guerres et plusieurs vies. Pompidou, l’homme de lettres, poète et grand fumeur de cigares. Je passe Giscard qui n’a pas brillé par ses aventures, on lui doit tout de même la bonne idée d’avoir pris Simone Veil dans son gouvernement, qui elle a eu une sacrée Vie, avec un grand V, comme Veil. Mitterrand, c’était le roman d’espionnage personnifié, l’homme des écoutes téléphoniques, l’homme des fréquentations interlopes, l’hommes des affaires sensibles et des cadavres dans les placards, l’homme double, triple, l’homme à la fille et au cancer cachés. Mitterrand, tout un roman ! A partir de Chirac, on va perdre en charisme et gagner en petites manigance et tripatouillages, les valises de billets, les financements illégaux, les malversations, les Tontons flingueurs & co. Sarkozy a repris le flingue de Chirac, faut-dire qu’il était le fils spirituel de Pasqua à Neully, qui lui aurait très bien pu jouer dans un film d’Audiard. Hollande enfin, flamby, l’homme à la tête de casque, empêtré dans ses histoires de femmes, la sienne ayant échoué à la Présidentielle 2007, un vrai vaudeville celui-ci, une pièce de boulevard, avec des maîtresses planquées partout.

Avec Barnier, nous n’aurons rien de tout ça. Avec Barnier, ce sera du sérieux, du grave, du gris, du chiant, bref on est parti pour s’emmerder. A commencer par son gouvernement dans lequel on ne connaît absolument personne, à part Rachida Dati, mais elle était déjà là dans celui de Gabriel Attal, elle était déjà là au temps de Sarkozy, autant dire qu’on la connaît bien et qu’il n’y a rien de nouveau. Migaud, Retailleau, Barrot, j’ai bien cru au début qu’il allait nous mettre que des ministres dont les noms se terminent en o, cela aurait été rigolo. Un peu comme le roman sans e de Georges Pérec, pas sûr que cela aurait fait rire les Français. Genetet, Pannier-Runacher, Panosyan-Bouvet, bref que des gens que personne connaît !

Peu importe au fond. La vraie question est, à quoi ça sert un ministre ? Nous venons de passer des semaines avec des ministres démissionnaires qui n’ont rien fait d’autre que d’attendre que le PR (Président de la République) choisisse un PM (Premier Ministre) qui choisisse lui-même des ministres qui plaisent au PR, tout ça en regardant les JO. Tout ça pour ça ! Pendant ce temps, la France ne s’est pas écroulée, elle aussi a regardé les JO assise dans son fauteuil et l’été s’est très bien passé. Autant dire que la réponse est évidente, un ministre ne sert à rien, les ministères fonctionnent très bien sans eux, les fonctionnaires savent ce qu’ils ont à faire, les ministres passent, comme on dit, les fonctionnaires restent. Alors puisqu’ils ne servent à rien, et que nous cherchons désespérément des économies à réaliser, pourquoi ne pas réduire drastiquement le nombre et aussi le nombre de conseillers surpayés qui les entourent. A l’heure où Antoine Armand, notre nouveau ministre de l’Economie, un gamin de 33 ans, c’est dire au passage si la situation économique est grave, veut mettre sur la table la question je cite du « salaire décent », on pourrait peut-être en profiter pour parler de la notion de « salaire indécent ». Payer dix ou quinze mille euros un conseiller ministériel à peine pubère pour enfiler des perles que lui envoie McKinsey sous forme de Powerpoint, juste parce qu’il sort de l’ENA ou de NormalSup, est-ce décent ? C’est dix fois le salaire d’un instituteur ou d’une infirmière ! Il a raison Armand, soyons décents !

L’autre question qui est sur toutes les lèvres et dans tous les esprits, c’est combien ? Combien de temps ce gouvernement va réussir à se maintenir en place, tant la mer est démontée dans l’Assemblée. Si ça se trouve, je vais devoir refaire un billet sur le nouveau gouvernement dans deux semaines. On n’a donc plus vraiment de grands acteurs et actrices politiques mais le spectacle continue néanmoins, the show must go on !


Références / Sources

Le Barbier de Séville, Beaumarchais, 1775.

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