MH370

Ce code à cinq caractères, deux lettres et trois chiffres, est connu des spécialistes, et même par le grand public, comme l’un des plus grands mystères de l’aviation civile. Il y a 9 ans jour pour jour, le vol MH370 de la Malaysia Airline en provenance de Kuala Lumpur et à destination de Pékin disparaissait des radars quelque part en mer de Chine, non loin du Golfe de Thailande, pour ne plus jamais réapparaître. A son bord, 12 membres d’équipage et 227 passagers, dont trois français d’une même famille et une majorité de Chinois, dont les proches deviendront fous de colère, il y a de quoi, quand ils comprendront qu’on les mène en bateau depuis le départ, et ce n’est pas pour sonder les océans. Jeff Wise, l’un des journalistes experts de l’aviation à s’être exprimés le plus sur cette affaire et à avoir formulé les hypothèses principales, a cette formule efficace : un avion, ça décolle d’un endroit et ça atterrit à un autre, ça ne peut pas disparaître en plein ciel ! Si ce n’est pas le cas, c’est qu’il y a une connerie quelque part et si ce n’est pas clair très rapidement, c’est que quelqu’un essaie de cacher quelque chose. Quatre mois après, les Russes dézingueront le même type d’appareil, un autre Boeing 777 de la Malaysia Airline, au dessus de l’Ukraine, faisant à peu près autant de morts que le MH370. Là, ils ne se sont pas cachés derrière leur kalach pour dire, c’est pas nous ! Ils n’ont rien dit de particulier, ni excuses ni justifications, ils ont juste shooté l’avion, à la Russe quoi ! Dans le cas du MH370, personne ne dit rien de concret, personne ne sait rien de certain, aucune preuve absolue, juste des hypothèses.

Plusieurs hypothèses ont en effet été échafaudées dans le cadre d’une enquête qui a intéressé le monde entier, et pas seulement les experts officiels dépêchés par les autorités malaisiennes. Journalistes, spécialistes, simples citoyens prêts à donner un coup de main, familles de victimes, juges, avocats… des centaines, peut-être même des milliers de gens se sont mis à chercher le MH370, l’enquête la plus chère de l’histoire à ce jour. Trois hypothèses ont finalement été retenues, trois hypothèses qui font l’objet d’un documentaire diffusé actuellement sur Netflix (1).

Hypothèse n°1 (la thèse officiellement retenue) : le pilote de l’avion, Zaharie Ahmad Shah a pété un boulon de sa carlingue, il débranche l’avion, le fait disparaître des radars – je dois dire qu’en tant que simple passager occasionnel des avions de ligne, je suis déjà surpris qu’un pilote puisse avoir la main sur le contrôle radar de son avion, comme un simple interrupteur ON/OFF, et qu’il puisse décider seul de le faire disparaître des écrans du contrôle aérien, je n’y connais rien mais cela me semble complètement con comme système. Bref, le gars a bien préparé son coup, il éteint la lumière pour que personne ne le voit, il fait demi-tour puis cap au sud, il dépressurise l’avion, au bout d’une quinzaine de minutes les passagers à cours d’oxygène meurent asphyxiés et lui continue à voler pendant six heures avant de s’écraser dans l’océan Indien. D’ailleurs, deux ans plus tard, une espèce d’aventurier, sorte d’Indiana Jones à la petite semaine, découvre devant les caméras des journalistes du monde entier, un morceau de l’épave qui aurait dérivé jusque sur les côtes de l’île de La Réunion. Fin limier, il en trouvera d’autres sans même se baisser à Madagascar et sur les plages de sable fin du Mozambique. Le FBI enfoncera le clou, puisque c’est eux qui ont perquisitionné le domicile du pilote malaisien et saisi son simulateur de vol personnel sur lequel ils ont trouvé, merveilleux concours de circonstance, le même tracé que celui emprunté « en vrai » par le MH370. Le gars s’est donc entraîné à se suicider ! Seulement, une chose m’intrigue. Que vient faire le FBI dans cette affaire alors qu’il n’y a aucun passager américain à bord et que les Etats-Unis ne sont a priori en rien concernés par ce drame, ni de près ni de loin. A moins que, mais j’y reviendrai dans la troisième hypothèse. Autre problème avec cette hypothèse officielle, contrairement à Andreas Lubitz, le jeune pilote allemand de la Germanwings qui s’est foutu en l’air, ou plutôt par terre, avec tous ses passagers dans les Alpes du sud, pour qui il n’a pas été difficile de remonter le fil de son histoire personnelle et de s’apercevoir que le gugusse était dépressif chronique et sous cachetons du matin au soir, Zaharie lui n’avait pas l’air d’être au bout de sa vie du tout. Il avait une famille, il faisait des tutos sur Youtube l’air souriant sur tout un tas de sujets de bricolage, il était reconnu comme un des meilleurs pilotes de la compagnie et surtout, on n’a pas trouvé une seule preuve matérielle qu’il ait eu envie de se suicider, absolument rien, juste ce fameux tracé identique sur son simulateur de vol que le FBI aurait retrouvé deux ans après. Tout cela ressemble fort à une mascarade.

Hypothèse n°2 (la plus farfelue) : elle a été formulée par le journaliste décrié Jeff Wise et elle met en scène trois passagers russes qui s’infiltrent dans le centre nerveux de l’appareil, situé juste sous une trappe non verrouillée (là aussi, arrêtez de nous prendre pour des cons merci) entre la première classe et la cabine de pilotage, prennent le contrôle de l’appareil, brouillent les données pour faire croire que l’avion file au sud alors qu’il va au nord, direction le Kasakhstan, pour se poser et y être démonté ou se crasher, au choix du complotiste. On le verra quatre mois plus tard, si les Russes veulent faire sauter un avion civil, ils le font sauter point barre et ne s’embarrasse pas des détails. Quel intérêt de monter une opération aussi tarabiscotée pour faire disparaître un avion malaisien avec des chinois dedans. Cela n’a aucun sens et ne correspond en rien à la manière de procéder des Russes, qui encore une fois ne sont pas connus pour la finesse de leurs interventions. J’ai encore en mémoire la prise d’otages du théâtre de Moscou par des Tchétchènes. Quand les forces spéciales russes interviennent, ils tirent dans le tas, terroristes et spectateurs, tout le monde y passe. Pas de quartier, pas de détail. Vodka i dasvidania !

Hypothèse n°3 (la plus probable) : il y avait ce jour-là d’importants exercices militaires dans la zone menés entre autres par les Américains et les forces de l’OTAN. Un skud a dû être balancé par erreur sur le MH370, fin de l’histoire ! Mais impossible à assumer vis à vis des familles et du grand public. Donc on invente une autre histoire, grotesque, et on balade tout le monde pendant des années. Une journaliste du Monde a mené une longue enquête sur cette affaire qu’elle a publié dans un livre en 2021 (2). Sans apporter de preuves irréfutables, personne n’en a jamais apporté à ce jour, elle évoque une mystérieuse cargaison à bord de l’avion, du matériel électronique volé aux Américains et à destination des Chinois. Ce qui expliquerait pourquoi les Américains aient été si présents dans l’enquête et les autorités chinoises si absentes. Mais pourquoi détruire l’avion en vol avec des centaines de passagers à son bord alors qu’ils auraient pu intercepter la marchandise à l’aéroport de Kuala Lumpur sans faire un seul mort ? Cela n’a aucun sens non plus. Alors certes, deux AWACS US, des avions satellites avec un gros champignons sur le dos, auraient décollé en même temps que le MH370 et avaient la capacité de brouiller les traces, voir de faire disparaître l’avion des radars, mais encore une fois, quitte à intercepter une marchandise sensible, pourquoi ne pas le faire au sol, c’est tout de même bien plus simple que dans les airs.

Histoire stupéfiante, n’est-ce pas ? Le documentaire de Netflix se termine par un plan sur Ghyslain Wattrelos, qui a perdu sa femme et deux de ses enfants dans la catastrophe, qui regarde la mer et l’horizon, et qui ne sait toujours pas où ils sont.

Sources / Références :

(1) MH370, l’avion disparu, mini-série documentaire britannique de Louise Malkinson (2023), trois épisodes de 59 minutes, sur Netflix

(2) : La Disparition, Florence de Changy, Les Arènes, 2021