# PolitiX

Un régime à bout de souffle

26 avril 2021

Selon une étude du Pew Research Center, un centre de recherche américain, 68% des Français souhaite une modification radicale du système politique. Un résultat comparable à celui des Etats-Unis (65%) mais nettement supérieur au Royaume-Uni (47%) ou à l’Allemagne (39%).

Ghislaine Ottenheimer, la rédactrice en cheffe du magazine Challenges, nous livre ensuite son analyse (1), attribuant au régime présidentiel de la Ve République (avec un président élu au suffrage universel direct) la cause de tous nos maux politiques. Il faut dire que c’est une spécialiste du sujet puisqu’elle elle y a consacré un essai intitulé Le Poison présidentiel (2).

Il faut admettre que l’élection présidentielle n’intéresse plus les Français. Et pour cause, à chaque élection le profil des candidats ne change pas. Et du coup, entre deux élections, rien ne change « radicalement » non plus. C’est toujours la même rengaine : un membre de la famille Le Pen, deux trois candidats issus des courants traditionnels (droite, gauche, centre, écolos) et toute une kyrielle de rigolos plus ringards les uns que les autres qui n’ont rien à faire là. Mais apparemment c’est ça la démocratie, tout le monde doit pouvoir s’exprimer, et même se présenter, à condition toutefois d’avoir les parrainages nécessaires. Mais des citoyens ordinaires, voire très ordinaires, ont-ils leur place à l’élection présidentielle ? Pas certain ! => Lire Moi candidat.

Les premiers sondages en vue de l’élection présidentielle 2022 sont tombés et les résultats ne sont guère plus surprenants qu’à l’habitude. Nous aurons le choix entre Macron et Le Pen, autant dire entre Macron et Macron. Tu parles d’un choix. A moins que celui-ci ne fasse pas de deuxième mandat, auquel cas, les perpectives seraient plus ouvertes. Mais les successeurs de Macron sont-ils si différents ? Anne Hidalgo, Xavier Bertrand, Valérie Pécresse, Jean-Luc Mélanchon, Yannick Jadot, toujours les mêmes profils de politiciens d’appareils. Avec cette perspective, on va encore battre le record d’abstention, toujours plus haut d’élection en élection.

Pour Ottenheimer, la solution n’est ni le régime présidentiel tel que nous le connaissons aujourd’hui, ni le tout « démocratique » consistant à demander à chaque citoyen ce qu’il pense de tout à tout moment via des pseudos référendums, d’initiative citoyenne ou pas. Non ! La solution serait un juste milieu consistant à renforcer les pouvoirs du Parlement, dans le cadre d’un régime représentatif fort, réforme « assortie d’une bonne dose de décentralisation ».

Autant sur la décentralisation, je suis complètement d’accord. Ce pays a besoin d’éclater le pouvoir politique et économique aux quatre coins, ou plutôt aux six coins de l’hexagone et d’en finir avec cette hégémonie parisienne.

Autant sur le renforcement du pouvoir du Parlement, à savoir les députés d’un côté, les sénateurs de l’autre, un système vieux de plusieurs siècles, si c’est ça la modernité, la solution radicale, non merci ! Combien de français connaissent le nom de leur député ou de leur sénateur ? Je n’ai pas la réponse mais on en a spontanément une petite idée. Pas beaucoup. D’ailleurs, on n’a pas besoin d’habiter un territoire pour en être le député, c’est dire s’il est représentatif. On pourrait imaginer un député des Hauts de France habiter à La Réunion ! C’est tout à fait possible. C’est d’ailleurs comme ça que Mélanchon est député de Marseille en habitant Paris. Après tout, si maintenant les Marseillais aiment les Parisiens, les matchs de foot seront plus amicaux. Enfin plus calmes qu’en ce moment, avec les mesures sanitaires et les tribunes vides, c’est difficile. Ou alors c’est juste du gazon. Mais je m’égare.

La solution n’est pas de donner plus de pouvoir aux juristes de l’Assemblée Nationale et aux retraités du Sénat. La solution consiste à simplifier et accélérer le processus législatif, devenu trop lent, trop lourd, trop juridique et technocratique, et à remplacer le Sénat par une assemblée de citoyens tirés au sort. Là, ça commence à renverser la table, ou si ce n’est la table, au moins les couverts.

Le problème de la France, on le voit aujourd’hui avec le Covid, c’est que c’est un vieux pays et un pays de vieux. Une démographie vieillissante, le pouvoir économique, patrimonial détenu par les vieux, de vieux hommes politiques, un poids écrasant des technocrates bien assis dans leurs fonctions et Ghislaine Ottenheimer nous propose encore de faire du neuf avec des vieux. A revoir !


(1) L’oeil de Ghislain Ottenheimer, Challenges du 22 avril 2021, p.23

(2) Poison présidentiel, Ghislaine Ottenheimer, Paris, Albin Michel, 2015

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