# CitizenX

Jeune Bayrouiste

9 novembre 2020

J’ai découvert la politique de parti avec un pote du lycée. Lui militait dans un syndicat étudiant, il était souvent à la sortie du bahut à distribuer des tracts et à prendre la parole en public dans les manifestations. Il était grand, charismatique, il avait une voix qui portait loin, une voix de stentor comme on dit. Je l’observais de loin, sans jamais vraiment m’intéresser à ce qu’il faisait ou disait. C’était juste mon pote. Jusqu’à ce qu’il m’invite à une réunion des jeunes UDF.

L’UDF, c’est l’ancêtre du Modem, le parti de Bayrou, le premier Garde des Sceaux de Macron qui a dû démissionner au bout d’un mois pour cause de financement illégal de parti politique. Ça démarrait bien cette séquence Macronienne ! On aurait dû se méfier.

Bref les jeunes UDF disais-je… euh je vous vois venir. Vous allez me dire, un syndicaliste étudiant en général c’est plutôt de gauche et puis « jeunes UDF », c’est un oxymore, une figure de style qui allie deux mots de sens opposé. A l’UDF, jeune ça commençait à 40 ans non ? Eh bien non figurez-vous, comme il y a eu une dizaine d’années plus tard des jeunes Sarkozystes, il y avait dans le milieu des années 90 des jeunes Bayrouistes, si Monsieur. Mon pote m’invite donc à une de ces réunions et je découvre pour la première fois la petite entreprise qu’est un parti politique et ses antennes locales. Et qui va sur tel ou tel marché ? Michel, t’as bien fait imprimer les tracts pour vendredi ? On a besoin de monde pour le boîtage (faire le tour des boîtes aux lettres), tu peux venir ? etc. etc. On était loin de l’idée que je me faisais d’un parti politique, même centriste. Je voyais plutôt ça comme un débat permanent, des prises de gueules, des idées sur comment on allait changer le monde. En réalité, il y avait beaucoup de boulot et donc besoin d’un maximum de bras. Les idées, on verrait ça après. Ou pas. Les idées c’est pas pour toi mon ptit gars.

Mon pote s’est rapproché d’un autre membre du parti, un peu plus âgé que lui, qui briguait la mairie de la petite ville de province où nous habitions. Je dis qu’il la briguait parce qu’il était ambitieux et que l’espoir fait vivre mais il savait que cette municipalité qui avait toujours été socialiste avait peu de chances d’être gagnée par un centriste. Mais il avait sa petite idée en tête, une botte de Nevers, celle de se présenter sans étiquette. La plupart des gens ne le connaissant pas, ils ne se poseraient pas plus de questions que ça sur son obédience politique. Du moins c’était son idée, sa stratégie. Et puis, il pouvait compter sur un petit groupe de soutiens, dont mon ami, qui en passionné de la chose électorale, s’est mis à analyser les précédentes élections, quartier par quartier, bureau de vote par bureau de vote, pour en sortir une lecture assez précise de l’électorat local.

Le jour du premier tour, le futur maire n’est même pas venu au dépouillement tant il pensait être loin. Et pourtant il arriva troisième et se qualifia pour le second tour, en ballottage, qu’il gagna grâce à l’éternelle discorde des partis de gauche. Voilà comment un jeune homme d’une petite trentaine d’année se retrouva maire d’une commune de près de 20 000 habitants sans s’y attendre ni s’y préparer. Et voilà également comment mon pote, d’à peine vingt ans, s’est retrouvé directeur de cabinet du maire. J’ai suivi ça de près et j’ai trouvé cela très excitant. J’ai compris à ce moment-là que la politique pouvait être une vraie science, que l’on pouvait gagner par la mise en place d’une bonne stratégie, comme une partie d’échecs.

J’ai vu que l’ascension pouvait être fulgurante… et plus tard je comprendrais que la chute peut-être tout aussi brutale.


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