# EconomiX

Bite con

1 mai 2021

Je ne sais pas vous, mais moi je ne comprends rien à cette histoire de bitcoin. Cette « cryptomonnaie » comme ils disent, dont la valeur atteint des sommets ces temps-ci. Imaginez un instant, si vous aviez placé ne serait-ce que 1000 euros au début du bitcoin, au moment où il ne valait même pas 1$, ou disons 1 € pour que cela vous parle davantage, vous auriez aujourd’hui en portefeuille environ 47 millions d’euros ! Je vais le répéter pour que vous soyez certain d’avoir bien compris, QUARANTE SEPT MILLIONS D’EUROS !!! Soit une véritable fortune pour le quidam, et pour seulement 1000 euros investis initialement, car 1 bitcoin vaut aujourd’hui 47 000 euros. C’est complètement surréaliste. Et même si vous aviez raté le train au départ et aviez investi en 2016, alors que celui-ci valait 500 €, avec 1000€, vous auriez donc pu acheter 2 bitcoins, qui valent aujourd’hui 94 000 €. En quatre ans seulement, vos mille euros auraient été multipliés par 94. Qui dit mieux ?

J’ai fait des études d’économie, économie disons classique où on nous apprend que la valeur d’une action, par exemple, est liée à la performance actuelle et prévisionnelle d’une entreprise, elle même soumise à des aléas, que l’on peut qualifier de risque. Ainsi, plus le risque est important, plus le sera le gain potentiel. Le fameux équilibre bénéfice risque, risque élevé bénéfice élevé, risque faible bénéfice faible. Les obligations d’Etat, à l’inverse, rémunèrent peu, le risque de défaut étant perçu comme faible. Enfin tout dépend des Etats, évidemment.

Dans le cas des bitcoins, le principe est respecté d’une certaine manière puisque le risque était très élevé. Et pour cause, puisqu’il s’agissait d’investir dans une monnaie virtuelle, numérique. Une monnaie qui n’a aucune existence en dehors des serveurs sur lesquels elle est hébergée. Les serveurs crament ou un bug et hop envolée la monnaie. Une autre manière de perdre son investissement, c’est de perdre son mot de passe. On appelle le bitcoin une cryptomonnaie parce qu’elle est cryptée et protégée par des mots de passe. Si vous perdez votre mot de passe, impossible de le récupérer comme sur un site internet traditionnel. Ici, perdu c’est perdu et l’argent avec. Et vu l’argent en jeu, y a de quoi devenir dingue. Vous aviez acheté 10 bitcoins pour 10€ au tout début, disons que vous êtes un geek et que 10€ c’est que dal, donc vous vous en foutez, vous les mettez sur la table. Vous écrivez le mot de passe sur un bout de papier ou sur un quelconque fichier d’ordinateur. Disons que pour une raison inconnue, vous oubliez que vous avez acheté ces 10 bitcoins, peut-être bien que vous étiez bourré et que vous avez fait ça pour délirer avec des potes. Admettons. Admettons que dix ans plus tard, vous vous souvenez de ces 10 bitcoins, mais le papier est parti à la poubelle depuis belle lurette et vous avez changé deux fois d’ordi entre temps, donc va t’en retrouver le fichier en question. Votre problème, c’est que vos 10 bitcoins valent aujourd’hui pratiquement 500 000 €. Cela fait cher le mot de passe perdu.

Vraiment je n’y comprends rien. En même temps, je n’ai pas le flair pour ces trucs-là. Pourtant je suis né au bon moment car j’avais une vingtaine d’années au début d’internet, le bon âge pour être opportuniste et malin. Mais je n’ai rien vu. J’achetais des noms de domaines pourris pour quelques projets impossibles pendant que d’autres, ayant compris la valeur que ces noms communs suivis d’un point et d’une extension pourraient avoir dans le futur, raflaient tous les noms intéressants pour quelques euros, noms qui vaudraient des millions moins de dix ans plus tard. Un copain m’avait dit, viens on se lance dans le e-commerce au début des années 2000. A cette époque, E-Bay venait à peine d’émerger de la baie de San Francisco. Amazon n’existait pas encore, Google à peine, et votre abonnement internet était facturé au débit, c’est à dire une fortune pour les gros utilisateurs. J’avais répondu à mon pote, je m’entends encore prononcer ces mots : « Le e-commerce ça ne marchera jamais vieux. Les gens aiment trop faire du shopping dans les magasins ! » Je vous l’ai dit, j’ai un certain flair pour le business !

La Pyramide de Ponzi, Xavier Bétaucourt, Nathalie Ferlut, ed. Delcourt/Mirages

Pour ce qui est du bitcoin, j’en ai bien entendu parler quand il a commencé à décoller mais je pensais que c’était une arnaque, une sorte de pyramide de Ponzi numérique. Une pyramide de Ponzi est une arnaque, à l’italienne dirais-je, car elle porte le nom de Charles Ponzi qui sévît du côté de Boston au début du XXème siècle, une arnaque consistant à attirer des couillons en leur promettant de gros rendements, payés avec l’argent des suivants, permettant de se faire de la pub, d’attirer encore plus de couillons et de faire gonfler la bulle. Sauf qu’en réalité, l’argent n’est jamais investi nulle part, sauf dans la poche de l’arnaqueur en question. Cette escroquerie a eu de nombreux disciples, dont le fameux Bernard Madoff.

Je pensais vraiment qu’il s’agissait d’une escroquerie digitale, montée de toute pièce par une bande de hackers venus du dark web. D’ailleurs, l’actualité semblait me donner raison quand par exemple je vit que Gerald Cotten, le tout jeune patron de Quadiga, la principale de société d’échange de bitcoins canadienne, était étonnamment mort en emportant avec lui tous les codes des comptes clients pour une valeur totale de 180 millions de dollars. Une mort plus que suspecte, et sa veuve de nous expliquer qu’elle a cherché partout les précieux codes, sous le lit, dans la table de chevet, dans le garage, rien ! Rocambolesque ! Rocancouresque même, pourrait-on dire nous les Gaulois, du nom de ce Français, Christophe Rocancourt, qui a fait croire qu’il était un descendant de Rockefeller (il est vrai que ça commence par les trois mêmes lettres) et a laissé des ardoises monumentales un peu partout aux Etats-Unis, jusqu’au traiteur qui lui organisa son anniversaire dans les Hamptons, lieu de privilégiature des milliardaires newyorkais et n’encaissa pas un centime.

Je pensais que le bitcoin était un immense dîner de cons 2.0 et je n’avais pas l’intention d’en faire partie.

Coinbase, la première plateforme boursière de bitcoins, vient d’être introduite en bourse et sa valorisation égale le Dow Jones, la bourse historique américaine et la première place boursière mondiale.

J’ai toujours eu du flair.


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