# SociétiX

Gamelles pleines

26 décembre 2022

Cette année, j’ai acheté le calendrier de Gamelles pleines, l’association qui s’occupe des SDF et de leurs compagnons à quatre pattes la plupart du temps, dont j’ai rencontré l’un des photographes, Jacky Lecanu, il y a quelques années.

Il faut dire que je suis sensible à la cause animale. J’ai grandi entouré de chiens et de chats. Peut-être même plus sensible aux animaux qu’aux humains, parfois en tout cas. Quand une personne m’aborde dans la rue pour me demander de l’argent, la plupart du temps je refuse en disant une connerie du genre que je n’ai rien sur moi alors que c’est faux. Pourquoi est-ce que j’invente ce bobard alors qu’il me suffit de dire juste non, sans doute parce que je culpabilise de ne pas donner. D’autres fois, je donne sans me poser de question, souvent je donne à ceux qui jouent de la musique dans la rue, parce que je me dis qu’ils se donnent de la peine, qu’ils font un effort et ne se contentent pas de tendre la main. C’est con je sais, comme s’il fallait mériter la mendicité. Tout à l’heure encore, au cœur de Strasbourg, non loin d’une place Kleber noire de monde, Strasbourg capitale de Noël est-il écrit sur les panneaux publicitaires des abri bus et c’est vrai qu’en tendant l’oreille, vous entendez ici toutes les langues du monde. Mardi j’ai acheté un ticket à l’Euromillion et j’ignore si depuis je suis devenu millionnaire car je n’ai pas regardé le tirage. Je vois un bureau de tabac-loto-pmu, c’est l’occasion de vérifier. Un jeune d’une vingtaine d’années est assis par terre devant, sale, les vêtements déchirés, la tignasse hirsute, il me dit en voyant mon ticket de loto, si vous gagnez je prends 30% des gains. Cela me fait rire. J’apprécie son humour mais voyant la queue à l’intérieur du bureau de tabac, tous ces gens qui rêve de changer de vie en ce jour de Noël, je fais demi-tour et glisse un billet dans le chapeau du jeune homme.

Dans la rue, il y a, me semble-t-il plus d’hommes que de femmes. Peut-être parce que la rue est un monde sans pitié, violent et que les femmes sont moins armées pour y survivre. Elles sont peut-être moins nombreuses mais elles sont là tout de même, et comme les hommes, elles ont souvent besoin d’un compagnon d’infortune, canidé ou félin, pour ne pas sombrer et dans le meilleur des cas, parvenir à remonter la pente. Gamelles pleines en met quelques-unes à l’honneur dans l’édition 2023 de leur calendrier.

Isabelle, Panouk, Prune & Sakuku

« Un pour tous et tous pour un ! Telle est la devise d’Isabelle qui ne conçoit pas la vie sans ses « trois affreux ». Victime de violences conjugales, elle s’enfuira sur le macadam, engendrant ainsi une situation de souffrance et d’isolement. En quête de réhabilitation, Isabelle a parfois songé au pire, mais fort heureusement s’est réconforté dans la tendresse de Prune, trouvant dans la relation avec sa chienne une motivation pour résister. Aussi, la naissance de Panouk, délivre un second souffle d’espoir. Garde-fous de son bien-être, les deux croisés labrador lui apportent un soutien indispensable contre l’errance, la solitude, l’insécurité et les incertitudes. Bien que les deux canidés ne tolèrent pas les chats, ils se ravisent sans ménagement, lorsque leur maîtresse adopte Sakuku, sauvé d’une mort certaine. Symbole du foyer retrouvé, Sakuku prend alors une place centrale dans sa nouvelle garde rapprochée. Bien entourée par ses trois fines lames, la souriante femme se projette à nouveau dans la vie. »

Bozo, Sohan & Kyna

« Une période de fragilité et de faiblesse a contraint Bozo à vivre dans la rue. Subvenir à ses besoins fondamentaux dans cet environnement instable, imprévisible et hostile était une épreuve herculéenne qu’elle affrontait avec beaucoup de dignité. Grâce à sa grossesse, Bozo a trouvé la motivation et la force d’alimenter un cercle vertueux qui l’éloignera définitivement de la rudesse du macadam. Devenir mère est certainement le plus beau cadeau que la vie lui ait fait. En dépit des préjugés, la mauvaise fortune ne réduit pas la valeur d’une mère, bien au contraire, elle l’incite à trouver une force d’âme supplémentaire. Bozo parle beaucoup avec son fils Sohan et veille toujours à lui présenter le bon côté des choses, le préservant ainsi des souffrances d’un monde impitoyable sans pour autant lui en cacher la dure réalité.

Adopté dès son sevrage, Kyna a grandi avec le garçon et contribue indéniablement à lui rendre la vie beaucoup plus belle. Incontestable complice de l’enfant, elle le distrait, le protège et le materne à tour de rôle. Le panier de sa chienne est ainsi devenu le repère inviolable et réconfortant, où Sohan peut se cacher à sa guise, s’y rassurer au besoin et s’y consoler de temps à autre. La vie n’est pas parfaite ni même juste et équitable. »

Ce récit de Sohan et de sa chienne Kyna me renvoit à ma propre enfance, non pas que j’ai grandi dans la rue et je ne peux même pas imaginer ce que c’est tellement c’est l’opposé de ce que j’ai vécu, mais j’ai souvent partagé ma gamelle et fréquenté les paniers des chiens avec qui je partageais ma vie quand j’étais petit. Je peux donc ressentir l’attachement de Sohan à Kyna.

Aurélie & Gruts

« Les conditions difficiles dans lesquelles se trouvent les personnes en situation d’exclusion, les obligent parfois à démissionner et se retirer tout doucement des relations sociales. Perdant progressivement confiance en elles, elles se sentent de moins en moins capables de parvenir à leurs projets, qui deviennent alors de plus en plus éphémères. Aurélie souhaitait profondément voir évoluer sa situation, mais conservait aussi l’angoisse de la voir se dégrader davantage. Grâce à son petit chat Gruts, le félin arrivé à point nommé, elle découvre au fond d’elle une énergie qui s’était alors endormie. Se définissant de nouveau comme une personne estimable et responsable, elle restaure progressivement la confiance en elle et se repositionne en tant qu’actrice de son destin. Grâce à Gruts, s’opère le réveil de la force.

Aurélie s’enquiert alors de sa mission personnelle et ose rêver de nouveau à la conquête des étoiles ! Soutenue dans sa bataille, la jeune femme s’affranchit de ce sentiment qui lui colle à la peau et se positionne pour un réapprentissage de la vie sociale et professionnelle. »

Si comme moi, ces récits vous touchent, n’hésitez pas à acheter le calendrier Gamelles pleines chez votre véto si vous le voyez ou à faire un don sur le site de l’association : www.gamellespleines.fr

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